La visite était annoncée, elle n’aura finalement pas lieu. La venue à Mayotte d’Aurore Bergé, ministre déléguée chargée de l’Égalité et de la lutte contre les discriminations, prévue dimanche, a été annulée. Une absence qui n’est pas passée inaperçue, tant elle intervient dans un contexte de crispation autour de la question de l’égalité réelle dans le 101e département.
Alors qu’elle était toujours attendue, le conseiller départemental Soula Said-Souffou a adressé une lettre ouverte à la ministre. Un texte dense et argumenté, qui dépasse la simple interpellation politique. L’élu y décrit une égalité républicaine sans cesse promise mais constamment reportée, dissimulée derrière les notions de « progressivité » et de « convergence ». À Mayotte, ces principes sont perçus comme des outils de gestion de l’inégalité plutôt que comme des leviers de rattrapage.
Le courrier pointe une application jugée dévoyée de l’article 73 de la Constitution, ainsi qu’une mise en œuvre incomplète de la loi de 2017 sur l’égalité réelle outre-mer. Résultat, selon l’auteur : des droits sociaux inférieurs, des services publics fragilisés et un sentiment persistant que la République fonctionne ici « en mode dégradé ».
L’annulation du déplacement ministériel renforce ce malaise. Non parce qu’une visite réglerait tout, mais parce qu’elle symbolisait une reconnaissance attendue. À Mayotte, l’égalité n’est plus un débat théorique. Elle conditionne la cohésion sociale, la confiance dans l’État et l’avenir du territoire écrit l’élu. Les Mahorais ne réclament pas des discours, mais des actes.
