En 2023 et 2024, le 101e département a réalisé jusqu’à neuf reconduites sur dix au niveau national
Alors que le débat sur l’efficacité des obligations de quitter le territoire français (OQTF) revient régulièrement sur la scène nationale, les chiffres mettent en lumière une réalité souvent méconnue : Mayotte porte à elle seule l’essentiel des reconduites à la frontière effectuées par la France. Une singularité statistique qui souligne le rôle central — et lourd — du département dans la politique migratoire nationale.
À l’échelle nationale, la France a procédé à un peu plus de 21 000 reconduites à la frontière en 2024, toutes catégories confondues (éloignements forcés, départs aidés et départs spontanés). Un chiffre globalement stable, malgré une hausse continue du nombre d’OQTF prononcées, qui dépasse désormais les 140 000 par an.
Mais derrière cette moyenne nationale se cache une concentration exceptionnelle. À Mayotte, environ 19 260 reconduites à la frontière ont été réalisées en 2024, soit près de 90 % de l’ensemble des expulsions effectuées sur le territoire français. Autrement dit, neuf reconduites sur dix ont eu lieu dans le département, alors que Mayotte ne représente qu’une fraction infime de la population nationale.
La situation était encore plus marquée en 2023. Cette année-là, environ 24 470 reconduites ont été menées depuis Mayotte, un volume supérieur au total national enregistré l’année suivante. Ces chiffres illustrent une pression migratoire exceptionnelle, principalement en provenance de l’archipel des Comores, et une politique d’éloignement particulièrement active sur le territoire.
Cette singularité s’explique aussi par le cadre juridique spécifique applicable à Mayotte. Contrairement à la métropole, le dépôt d’un recours contre une OQTF n’est pas automatiquement suspensif, ce qui permet une exécution plus rapide des décisions administratives. À cela s’ajoute la proximité géographique avec les Comores, facilitant des reconduites maritimes fréquentes.
En miroir, la situation en métropole apparaît très différente. Malgré des dizaines de milliers d’OQTF prononcées chaque année, seule une minorité se traduit par un départ effectif, souvent freinée par des obstacles juridiques, administratifs ou diplomatiques.
Ainsi, Mayotte supporte à elle seule l’essentiel de l’effort français en matière de reconduites à la frontière, une réalité statistique lourde de conséquences pour le territoire, tant sur le plan sécuritaire que social et institutionnel.









