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Prison ferme pour passage à tabac et séquestration d’un délinquant

08h38 :

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Un prévenu comparaissait mercredi pour des faits remontant à juin 2018. Suite à un vol commis le jour de l’Aïd, le gendre de la personne dépouillée et son ami ont passé à tabac, puis séquestré l’un des délinquants, pour le livrer ensuite à la police. Une vendetta qui tourne mal au cours de laquelle des coups de feu seront tirés, et que le tribunal condamnera fermement en dépit des zones d’ombres qui planent sur l’affaire.

Des deux prévenus convoqués hier au tribunal judiciaire, M. Bamcolo et M. Mhadji, seul le premier s’est rendu à l’audience. M. Bamcolo comparaissait alors sous le coup de plusieurs inculpations pour une histoire datée du 15 juin 2018, jour de l’Aïd.

Pendant les célébrations, une bande de jeunes profitait alors des festivités pour s’introduire dans une maison, celle de la belle mère de Bamcolo, pour y dérober diverses affaires, à l’instar d’un sac et d’un portefeuille. C’est alors que le gendre et son ami décident de se faire justice eux-même.

Une affaire douteuse d’arme à feu
La police est alors appelée à M’tsapéré, en renfort de la BAC, par l’un des passants attestant avoir entendu des coups de feu. Une fois sur place, les forces de l’ordre étaient reçues par un homme qui leur remet alors deux douilles de cartouche, avant d’expliquer qu’un homme a été passé à tabac dans une impasse non loin, puis emmené de force dans un véhicule. Les policiers reçoivent ensuite une information, transmise par Bamcolo lui même : les deux prévenus sont alors à Cavani, et attendent les forces de l’ordre pour leur remettre le délinquant capturé, Zinedine. Ils sont alors interpelés. Dans la voiture du prévenu, l’on trouvera une arme de poing tirant des plombs. Pourquoi dira t-on alors avoir trouvé des douilles sur les lieux de l’affaire, puisqu’un pistolet à plomb ne laisse pas de douille… Pourtant, dans les inculpations, figure le transport sans motif d’une arme de catégorie B, ce
qui n’est pas la catégorie du pistolet à plomb. Une zone d’ombre que les juges n’évoqueront pas, et que l’avocat de la défense balayera d’un revers de manche lorsqu’on lui demandera en off.
Alors, que s’est t’il réellement passé ?

Des coups de feu pour faire fuir la foule ?
Dans sa déclaration, le prévenu expliquera qu’une fois arrivé chez sa belle-mère, il surprend les enfants en pleine action. C’est à ce moment qu’il se saisira de la victime, Zinedine, que lui et son complice passeront à tabac. Il contestera avoir porté des coups et remettra la faute sur Mhadji, l’autre prévenu. Petit bémol, il admettait à l’époque lors de sa garde à vue qu’il avait asséné quelques gifles à la victime.
Faisant monter la victime dans la voiture, les deux prévenus se lanceront alors dans une chasse à l’homme pour retrouver les autres voleurs, laquelle les mènera jusqu’à M’tsapéré, où, selon Bamcolo, un guet-apens les attend : des jeunes se regroupent autour d’eux et il tire alors plusieurs fois en l’air pour disperser la foule, par peur. Au pistolet à bille. Pourtant, le son d’un pistolet à bille n’est pas très dissuasif. Celui d’une vraie arme par contre… Il légitimera d’’ailleurs sa possession de l’arme en question (le pistolet à billes de plomb) par sa pratique de la compétition au stand de tir.
« Vous aviez peur, vous avez tiré en l’air mais vous avez quand même pris le temps de mettre la victime et la jeune fille dans la voiture. », soulignera le juge.
La victime, présentant plusieurs plaies à la jambe et à l’avant bras, expliquait dans le procès verbal que Bamcolo lui avait alors mis l’arme sur la tempe : « Si je ne trouve pas le portefeuille, je te tue ». Cela au moins, c’est dissuasif.

« Une vendetta qui tourne mal un jour de fête, »
Le procureur particulièrement prolixe résumera pourtant l’affaire en une phrase perdue au milieu de ses réquisitions : « On a un exemple relativement typique de ce que peut être la justice privée, quand tout un chacun essaye de se substituer à l’action qui doit rester celle de la police et de la gendarmerie ». Il évoquera cette « vendetta qui tourne mal un jour de fête », et expliquera que les affaires ou la population se fait justice soit même sont communes à Mayotte. En effet, la loi du Talion n’est jamais très éloignée dans le 101ème départe- ment. Une affaire qui n’est pas sans évoquer celle des Badamiers, bien qu’elle soit d’une toute autre gravité : la victime n’a écopé que d’un jour d’interruption de travail, là où la vendetta des Badamiers a coûté la vie au délinquant séquestré.

Le tribunal décidera néanmoins de marquer le coup avec de la prison ferme : 9 mois d’emprisonnement et une amende de 3000 euros pour Bamcolo, assortis d’une interdiction de port d’arme. Quant au complice absent, Mhadji, il écopera carrément de 12 mois d’emprisonnement assortis d’un mandat d’arrêt, et ce à cause de son casier judiciaire déjà bien rempli. Sans compter son absence : ignorer les convocations du tribunal n’est jamais très bien perçu par le par- quet.

Mathieu Janvier
France Mayotte matin

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