Savez-vous qu’en décembre 1976, la ville portuaire de Mahajanga à Madagascar a été le théâtre d’un drame sanglant ? Une querelle de voisinage se transforme en une tragédie de grande ampleur : le massacre du Rutaka. Bon nombre de Comoriens et de Mahorais sont tués. Plus de 15 000 réfugiés prennent la fuite, laissant une mémoire douloureuse et durable.
Violences à Mahajanga : chronique d’un drame oublié
Le massacre de Rutaka éclate en 1976 sur la côte nord-ouest de Madagascar, dans la ville de Mahajanga. En quelques jours, des miliciens Betsirebaka, issus de plusieurs ethnies du sud-est malgache, s’en prennent aux Comoriens et Mahorais installés dans la cité portuaire. Machettes, coups de feu, incendies : la violence explose, sans retenue. Les témoins de ce massacre à Majunga évoquent des scènes de mutilations, de viols et de tueries collectives. Face à ce déchaînement de haine, que certains qualifieront plus tard de tentative de génocide comorien, le bilan est lourd. Entre 500 et 2000 personnes perdent la vie.
L’urgence de l’exil : le rapatriement des Sabenas
L’ampleur du massacre de Rutaka choque et oblige à une réaction rapide. Face à l’urgence, plus de 15 000 réfugiés prennent la route de l’exil. Hommes, femmes et enfants quittent précipitamment leurs foyers pour échapper à la violence des Betsirebaka. La compagnie aérienne belge Sabena est mobilisée pour assurer leur évacuation et leur rapatriement vers l’archipel des Comores. Ces rescapés seront bientôt surnommés les « Sabenas du Rutaka ».
Les victimes du massacre de Rutaka à Madagascar appartiennent en majorité aux communautés comoriennes et mahoraises. Beaucoup d’entre eux sont considérés comme ressortissants français, mais leur statut administratif reste flou, nombre d’entre eux n’étant pas inscrits auprès du consulat.
Un traumatisme majeur pour la société à Mayotte
Répartis entre Grande Comore, Anjouan, Mohéli et Mayotte, ces réfugiés portent avec eux le traumatisme d’un massacre. Leur arrivée massive bouleverse les équilibres locaux et resserre les relations entre l’île française et ses voisines comoriennes. À Mayotte, l’épisode laisse une marque durable : dans un contexte de tensions régionales, il renforce le sentiment d’appartenance à la République française et la quête de protection qu’elle incarne.
Un drame encore présent dans la culture et la mémoire locale
Plus de quarante ans après, la mémoire du massacre de Rutaka reste vive, bien que rarement évoquée dans les actualités de Mayotte. Cela demeure un souvenir douloureux et s’inscrit dans l’histoire de Mayotte et la culture régionale. Pour les familles de victimes comme pour les rescapés, ce drame reste un rappel poignant des fragilités identitaires et migratoires qui traversent toujours Mayotte et l’Océan Indien.
Ce massacre de Rutaka, souvent relégué dans l’ombre des grandes tragédies africaines, a pourtant façonné l’histoire contemporaine de la région. Il témoigne à la fois de la vulnérabilité des minorités, mais aussi de la résilience des communautés qui, malgré la souffrance, ont trouvé la force de se reconstruire.






