La France s’apprête à distribuer à chaque foyer un livret de survie détaillant les gestes essentiels en cas de crise majeure. Une initiative inédite, annoncée au moment même où le chef d’état-major des armées alerte sur l’aggravation des menaces, et alors que le président Macron doit bientôt s’exprimer sur la situation stratégique du pays. Pour beaucoup, ce faisceau de messages pose une question simple : que cherche à dire l’État ?
Dans le fond, il ne s’agit pas d’annoncer un danger imminent, mais de préparer la population à un environnement moins stable. Chocs climatiques, risques industriels, tensions géopolitiques, cyberattaques : les autorités estiment que la résilience civile doit désormais compléter la défense militaire. Le livret – parfois présenté comme un “kit de survie” – vise à donner aux citoyens les bases pour tenir 48 à 72 heures en cas de rupture d’eau, d’électricité, de réseau ou de transport.
Pour l’Hexagone, le message est important. Pour les Outre-mer, il est crucial. Mayotte, La Réunion, la Nouvelle-Calédonie, la Guyane ou encore les Antilles ont déjà vécu ce que signifie une rupture prolongée de services essentiels. À Mayotte, les cyclones Chido et Dikiledi, la crise permanente de l’eau ou les coupures généralisées ont montré à quel point l’île reste vulnérable. Un livret de préparation n’est pas un gadget : c’est un outil vital dans un territoire où un tiers de la population peut se retrouver sans eau potable et où les infrastructures sont fragiles.
L’envoi national de ce document marque aussi un changement de doctrine. Jusqu’ici, la sécurité civile reposait principalement sur l’État, les collectivités et les secours. Désormais, chaque famille doit être capable de gérer le tout premier niveau d’urgence. Une vision déjà pratiquée en Finlande ou en Israël, mais nouvelle en France.
L’enjeu pour les Outre-mer est double : mieux informer les populations et pousser l’État à renforcer réellement les infrastructures locales. Car si la pédagogie est indispensable, elle ne remplace ni les réseaux d’eau fonctionnels, ni des centrales électriques fiables, ni une présence renforcée des services publics.
En filigrane, c’est un message de lucidité : le monde devient plus instable, et la France assume de le dire. Mais dans les territoires ultramarins, exposés aux crises plus tôt et plus violemment qu’ailleurs, ce geste doit être suivi d’investissements massifs. À Mayotte notamment, préparer les habitants est nécessaire ; sécuriser durablement l’île reste indispensable.







