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Retour sur les habitants de Kani Kéli qui se sont interposés face aux gendarmes

Les opérations de lutte contre l’immigration clandestine se poursuivent en terre comme sur mer. Elles sont préparées et pilotées sous l’égide de l’opération Shikandra. Elles permettent en mer d’intercepter des kwassas et de repousser les embarcations au-delà des eaux territoriales françaises. C’est une opération de ce type qui a eu lieu en mer mercredi au large de Kani-Keli, elle a conduit à l’interception en mer d’un kwassa avec à son bord 34 passagers. Tous étaient destinés à être amenés au CRA.

Comme l’opération était mise en place après la détection de l’embarcation par les radars, les gendarmes et le DLEM ont convergé vers le village de Mbouini dans la commune de Kani-Keli pour arrêter les occupants du kwassa au moment où ces derniers allaient toucher le sol ; les 5 camions de gendarmerie attendaient le feu vert des équipes sur la plage pour venir chercher les clandestins. Les services de la Préfecture précisent à ce titre que : « Vers 16 heures, les forces militaires en mer ont identifié un kwassa transportant 34 clandestins. Les intercepteurs de la police aux frontières et de la gendarmerie étant engagés sur d’autres cibles, les 34 clandestins ont été interpellés à terre par la gendarmerie. La Préfecture rappelle que si cette arrestation n’avait pas été programmée, les 34 passagers seraient venus grossir les rangs des clandestins vivant sur notre île.

C’est là que les difficultés ont commencé pour l’opération, une centaine d’habitants de la commune se sont interposés face au passage des 5 camions de gendarmerie s’apprêtant à descendre vers la plage. Ils ont bloqué la route. La raison du blocage nous est expliquée par Ayouba Assani Soufiane, élu dans l’opposition à Kani Keli : « les habitants de Mbouini ne veulent pas que leur plage devienne un quai pour faire débarquer des clandestins dans la perspective de les emmener au CRA». Les habitants voudraient que les autorités choisissent une autre plage afin de préserver la tranquillité des habitants et de ne pas attirer d’avantage les clandestins sur leur plage ou bien fassent converger les ESI vers le CRA par la mer. Ils expliquent également qu’après négociation avec Abdou Rachadi, le Maire, ils ont laissé passer les 5 camions dans les étroites rues du village. Maire qui au début ne voulait pas non plus laisser passer les camions de gendarmes, de longues heures de négociation ont été nécessaires. Les villageois auraient précisé que c’était le dernier passage, qu’ils s’interposeraient s’il devait y en avoir un autre. Pour autant, un élu communal assure que les habitants restent mobilisés en faveur de la lutte contre l’immigration clandestine. Comprendra qui peut… l’obstruction aura duré 6 heures selon la Préfecture.

Les habitants attendent donc de la part de la municipalité qu’une concertation soit entreprise avec les services de l’Etat pour ne plus utiliser cette place comme « une sorte de quai de débarquement informel de clandestins ». Pas toujours évident de bien comprendre les attentes de la population qui se dit contre l’immigration clandestine d’une part et qui complique l’accès aux forces de l’ordre. Les barrages et blocages des habitants auront en parallèle occasionné un blessé, une adjointe au Maire de la commune qui a été prise en charge par les secours et évacuée vers le dispensaire de Mramadoudou. De son côté la Préfecture explique que pendant que les 34 ESI concernés étaient transportés au CRA par la route, les brigades nautiques de la PAF ont pu intercepter 3 autres kwassas avec à leur bord pas moins de 49 autres ESI.

En synthèse, la lutte contre l’immigration clandestine ne peut pas réussir sans la coopération des collectivités locales que le Préfet appelle régulièrement de ses vœux. Collectivités qui doivent respecter la Loi d’une part mais qui sont aussi largement encouragées dans leurs initiatives par leurs administrés ! En effet, si la lutte contre l’immigration clandestine est une compétence régalienne, les Maires disposent de nombreux pouvoirs permettant de renforcer la lutte. Dans le cas présent, la négociation avec les villageois pour organiser cette lutte sur les territoires. Ils ont aussi la responsabilité de l’Etat civil et sont le premier niveau pour détecter les reconnaissances de paternité frauduleuses ou les problèmes lors de l’émission de certificats d’hébergement. Ils ont aussi la possibilité de mobiliser les textes de loi pour faire détruire dans les 48h toute construction de case en tôle sur l’emprise des villages que les terrains soient publics, privés ou non titrés. La commune de Ouangani a procédé à la destruction de 5 cases en début de semaine. Le maire de Chirongui a annoncé cette semaine également qu’il comptait s’attaquer au problème sans tarder. Reste à savoir maintenant ce que va entreprendre Abdou Rachadi le maire de la commune dont la fonction est suspendue à une décision du Conseil d’Etat.

Un article d’Anne-Constance Onghéna à retrouver dans l’édition de France Mayotte Matin du vendredi 19 mars 2021.

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